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On pourrait croire que je cours après mon passé, mais c’est bien pire. Je me souviens du dernier soir comme si c’était demain.

Hubert Haddad, Mà.

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Vocation

J’ai entendu il y a longtemps le biologiste Jacques Testard à la radio dire en quelque mots de son expérience qui m’a semblé assez intéressante pour être rapportée. 

C’est son amour de la nature qui lui a fait choisir la biologie. Normal. Or il s’est retrouvé rapidement devant un dilemme : Il n’y avait tout simplement pas (ou très peu) d’études de haut niveau concernant la « nature », et encore moins de débouchés professionnels. C’est devant ce constat qu’il a fait comme beaucoup d’étudiants : il a choisi la seule voie un peu moins risquée et qui valorisait le parcours universitaire : la biologie moléculaire.

Ainsi font de nombreux étudiants depuis des décennies. Il semble aujourd’hui hors de doute que les connaissances biologiques se situent définitivement au niveau moléculaire génomique, protéomique, bio-informatique, etc. 
elles miment ainsi une fois de plus la physique qui a trouvé son graal dans la physique des quantas. Et de même que son grand modèle, cette voie vers l’infiniment petit ouvrent de juteuses et inattendues perspectives industrielles, et de carrières.

Or cet adossement de la biologie à l’eldorado technologique éloigne souvent définitivement le biologiste de la nature. 

De plus il devra accepter sans trop montrer d’esprit critique la doxa dominante dans la matière, à savoir depuis bientôt 200 ans le darwinisme triomphant. On me dira que tout ça a bien évolué, épigénétique, et toute la science en marche en témoigneraient. Mais est-ce si sûr ? Il suffit de voir les émissions grand public pour en douter. Des jeunes m’ont affirmé récemment qu’on continue d’apporter au lycée la « preuve » de la validité des thèses darwiniennes de la sélection « des plus aptes » avec le fameux exemple des papillons dont la coloration deviendrait plus terne dans les secteurs industriels pour se confondre avec la couleur grise du tronc des arbres et éviter ainsi d’être bouloté par les oiseaux. Papillons qui ne se posent presque jamais sur les troncs et ne sont pas vraiment mangés par les oiseaux ( Chauvin, la fin du darwinisme). L’histoire du Darwinisme est émaillée de ces fausses preuves had hoc, plus ou moins grossières, mais qu’il était indispensable d’admettre dans l’institution.

Stephen Jay Gould a commis un essai de plus de 1000 pages, avec tout le poids de sa notoriété, pour se permettre d’émettre quelques avis contraires au maitre. J’avoue ne pas l’avoir lu en intégralité, mais quelques bon morceaux tout de même, passionnants. Il essai en particulier de faire valoir la simple idée iconoclaste selon le dogme darwinien, que la sélection naturelle s’exerce marginalement sur les individus, mais elle s’exerce d’après lui essentiellement entre les espèces : les mécanismes évolutionnistes auraient lieu plutôt à ce niveau, voire aux niveaux encore supérieurs, et dans ces mécanismes en premier lieu la barrière reproductive, l’isolation des espèces qui en découle. Il appelle ça l’émergence des propriété nouvelles au niveau de l’intégration biologique que représentent les niveaux d’organisations supérieurs, et donc en particulier les espèces, mais pas que.

J’aime imaginer ce genre d’exemple : est-ce que le vol plus ou moins lent d’un moustique par rapport à son voisin, et donc son fitness personnel va avoir une incidence sur l’hirondelle ou la chauve-souris qui va le gober. certainement pas, il était simplement sur la trajectoire. Mauvais karma. Par contre l’espèce dont l’habitus consiste à voler très près du sol, ou dans des secteurs, des créneaux horaires plus tranquille, pourrait avoir statistiquement un avantage.

Je pense souvent aux éphémères, premiers êtres vivants sur terre à avoir « inventer » le vol. Après 250 millions d’années de bons et loyaux services, ils sont toujours là. Insectes archaïques quoique splendides et parfait à leur manière, leur vol est très fruste. Ils ne connaissent qu’une marche avant poussive, un vol pendulaire de pariade sans la moindre acrobaties. Malgré ses handicaps sévères et la survenue plus tardives d’insectes véritables surdoués de la voltige comme les mouches vraies, ils sont toujours là. La nature n’est pas spécialement darwinienne si on va par là. 

Il est vrai que le principal modèle d’adaptation que Darwin avait en tête, c’était les modifications rapides de la morphologie des bovins anglais soumis à la sélection de l’élevage. Il est vrai que l’homme a par exemple fait subir aux chiens des modifications incroyables d’une race à l’autre. Pourtant il n’en est jamais sorti une espèce nouvelle, et cela depuis le néolithique. D’ailleurs les chiens s’hybrident toujours avec les loups dont ils sont issus (quelle espèce de loup ? cela est au-dessus de ma compétence)

Darwin, pur produit de la société Victorienne régnant sans partage sur le dix-neuvième siècle, a pu bénéficier d’un crédit sans faille de la part d’un système qui approuvait les supposés politiques sous-jacents de sa théorie. Et en effet les vainqueurs apprécient particulièrement les tautologies simples :  nous sommes les maitres car c’est nous les meilleurs, les plus aptes, etc. La encore S.J. Gould n’hésite pas à aborder le sujet.

Les études taxonomiques, études de la nature, des espèces, se portent mal. Des labos ont fermé, les spécialistes partent à la retraite puis au columbarium. Ce sont des activités moches, pas de galons à prendre, pas d’argent à se faire, pas de carrière. Même les bons tirent le diable par queue. Alors pourquoi perdre du temps ces sujets pas du tout sexy, qui sentent le formol des vielles armoires du muséum.

Bien sûr il suffit d’un filet à papillons au naturaliste, tandis que pour donner le moindre résultat la biotech aura produit un demi camion de plastiques et de déchets chimiques.

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